Critique | Cars 3

Cette critique a été écrit par : Maxime

Le cinéma d’animation a toujours connu son lot d’admirateurs et, malgré certains poncifs qui perdurent, il n’est pas réservé à l’enfant ; Pixar en est le plus noble exemple. Se démarquant par ses récits éthérés, son style graphique virtuose et raffiné ainsi que ses traitements poétiques d’un hétéroclisme avéré, le studio n’a cessé de surprendre avec des œuvres profondes qui sont rapidement devenues consensuelles auprès des critiques, cinéphiles et autres âmes égarées dans les salles obscures. Cars, à cause de sa synecdoque invraisemblable et de ses blagues pas toujours appréciés, souffre régulièrement du titre de « moins bon Pixar ». Pourtant, c’est un film extrêmement bienveillant et généreux qui ne déroge pas aux partis pris narratifs et esthétiques de ses prédécesseurs. Après un second opus gâché par la redondance et la lourdeur de ses séquences humoristiques, Cars 3 est un franc succès qui renoue avec le lyrisme et la fraîcheur des origines de la saga, un métrage qui fait du bien !


Flash McQueen se fait vieux dans le milieu, son nom n’a pas changé mais ce dernier s’avère tout autre. Confronté à une nouvelle génération de bolides aux performances accrues, il ne peut nier cette vérité factuelle : il est dépassé.  Débute alors un long et compliqué parcours existentiel à la suite duquel le vétéran risque de ne pas sortir inchangé.

Si ce nouvel opus fonctionne à ce point, c’est en partie parce qu’il marche sur les pas des toutes premières aventures de Flash McQueen et il s’érige assez rapidement en un « film hommage« . Le film débute par une course tonitruante aux accents épiques, se noue d’un cœur dramatique caractérisé par un long exode qui va laisser place au doute et se conclue par un twist lors de la fameuse course finale. Malgré certains dialogues et réflexions un peu trop explicites, le film nous baigne dans une ambiance pathétique de par ses protagonistes languissants et leur caractérisation : Flash, bien qu’un peu prétentieux, est un concurrent respectueux et féru de courses qui est tiraillé entre un deuil inachevé, une aisance qui s’estompe et son incompréhension du nouveau monde.

Sa coach et camarade, Cruz Ramirez, est une personne joviale et passionnée qui se voit, quant-à-elle, conditionnée par une société imposante face à laquelle elle n’arrive pas à s’opposer. Entre séquences de dialogues impudiques, analepsies qui embellissent une époque où tout semblait avoir meilleur goût, ruptures amicales marquantes, tourments existentiels, ode à la vie et au partage, le film se savoure avec tendresse et implication.

Fidèle à ses rouages humanistes, Pixar n’oublie donc pas d’agrémenter son récit de ce qui fait sa force : ses degrés de lecture multiples, ses vagues d’évasion nostalgique, son alliage entre pathétisme et comique, ses inspirations de mise en scène grandioses… Ce film évoque avec intelligence le poids de l’héritage, le paradoxe du doute, l’estime de soi et l’aliénation certaine de la vie sociale, l’ambivalence du progrès et le rôle du conservatisme, les dangers du capitalisme et de ses répercussions, l’aspect extatique et passionnel de la transmission, la nécessité de l’opiniâtreté, la beauté de la vieillesse, de quoi à la fois faire vibrer le spectateur grâce à la tendresse des plans, grâce à l’énergie et la tension de certaines péripéties mais aussi le faire réfléchir sur notre société et plus généralement sur l’Homme ainsi que sur les pratiques qui le prédominent.

Si le film dépeint si bien ces émotions, s’il arrive à être marquant, à rendre ses messages perceptibles, c’est bel et bien grâce à l’insolente efficacité de sa mise en scène, grâce à son esthétique au sommet et à son ambition. Ce troisième opus est celui de la maturité, une maturité qui se retrouve à l’écran : le film s’aventure dans un environnement rural, McQueen prend part à des compétitions de tacots, n’ose pas à rendre boueux son capot s’il le faut… La récurrence de cette atmosphère terne, brumeuse, grisâtre fixe le traitement adulte et cru de son scénario.

Sous le regard de sa caméra fluide, de ses angles multiples, de ses travelings, de ses idées remarquables, le charme s’installe, comme pour ce plan où McQueen, s’épanouissant dans un environnement bucolique auprès de gens qu’il apprécie, perd cette peinture, ce nouveau design qui lui avait été assigné par son manager à l’esprit mercantile, Sterling, après avoir bondi d’un terrain surélevé. Ce dernier retrouve le plaisir de rouler, il est en plein rêve, sur un nuage. Toute cette part d’artificialité qu’il  avait en lui, son rôle médiatique et marketing ne sont plus de ce monde.

Nous avons droit au vrai Flash, à celui qui aime rouler, qui se complaît dans la vitesse, qui déifie le challenge, pas à la personne qui se cache derrière un personnage. De l’image naît le vrai sentiment, pas du dialogue.

À la conception artistique magnifique, aux affluences narratives lyriques et « rocky-ennes » ainsi qu’à la suavité indélébile, Cars 3 est donc une fable élégiaque et nostalgique qui décape les vieux briscards aussi bien qu’elle adoucit les jeunes.

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